Proust au Noir. Los Angeles : une fiction proustienne
Que reste-t-il d’À La Recherche du Temps Perdu un siècle après sa parution? Un siècle après l’érosion des pluies acides de la critique? Un précipité noir. Noir comme un roman noir. Dans La Recherche, le crime est symbolique. Les meurtres se font en série. Chronique de la mort annoncée d’un auteur, de la noblesse, d’une France féodale, monarchique, catholique et rurale, La Recherche propose une enquête et Marcel est son détective. Cet essai propose une nouvelle recherche sur La Recherche à travers la légende noire de la couleur noire. L’histoire alternative d’une couleur pas seulement élémentaire mais aussi complémentaire, qualité commune à deux éléments hétérogènes : la littérature et le cinéma. Un essai à double équation où le cinéma se lit au grand jour et la littérature se voit dans le noir. Un essai à la recherche d’une inconnue à variables multiples qui se dévoile presque nue, ici sur la faille, quelque part près du Pacifique, à Los Angeles.
Dominique : Qu’est-ce qui est à l’origine de cette audacieuse lecture de l’oeuvre de Proust ?
Fanny : Une conversation un dimanche au musée avec un ami et puis un projet de lecture hebdomadaire et collective de la Recherche dans un parc de Los Angeles (qui a donné lieu à un article dans la Los Angeles Review of Books en 2013).
Dominique : Comment Proust a-t-il perçu le cinéma et quels ont été ses relations avec ce nouveau mode d’expression ?
Fanny : Les relations de Proust avec le cinéma ont été ambivalentes. Rejetant un cinéma réaliste de ‘notations’, il préfère, comme la littérature, un cinéma de l’intime, qui dévoile la vision intérieure, ce ‘livre intérieur’ dont l’artiste est pour lui le seul traducteur.
Dominique : Quel réalisateur pourrait, à ton avis, livrer une transposition contemporaine de La Recherche ?
Fanny : Visconti est mort avant de pouvoir réaliser une adaptation de la Recherche qu’il considérait comme l’un de ses plus ambitieux projets. J’aime énormément l’adaptation du Chilien Raoul Ruiz du Temps Retrouvé qui a su brillamment traduire à l’écran toute la richesse et la profondeur poétique de l’image proustienne. L’adaptation de Chantal Hakerman de la Captive fut aussi remarquable. Parmi nos contemporains, je pense à François Ozon ou encore Christophe Honoré. Une adaptation libre de Proust au Noir par Sofia Coppola ou Guillaume Canet serait aussi intéressante !
Fanny Daubigny est auteur et traducteur. Elle a publié de nombreux articles sur Marcel Proust et est spécialiste des littératures françaises et francophones du 19e et 20e siècle. Elle réside à Los Angeles, cité des anges et ville du crime.
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